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Chapitre -06
La suite de la semaine fut éprouvante, n'ayant pas de famille mais étant légalement majeur, Charles se retrouve face à une montagne de tracasseries administratives qui le dépassent. A sa demande, je l'ai accompagné dans ces démarches, comme j'ai pu, le moins mal possible. J'ai pris soin de lui aussi dans ce moment de grande douleur, faisant de mon chez moi, notre chez nous.
Comme mon appartement n'a qu'une seule chambre, nous dormons dans le même lit. Mon canapé n'est même pas convertible. Par reflexe Charles se blottit contre moi toutes les nuits, je comprends que je lui offre ma chaleur comme réconfort et je respecte son deuil, profitant simplement de sa douce présence à mes côtés.
Il a fallu rapidement prendre la décision douloureuse de vider l'appartement de sa mère : le loyer était une charge pour Charles sans revenus malgré l'assurance vie que sa mère avait contracté à son profit. Et puis rester dans ces lieux lui était insupportable. Un garde meuble fut le refuge de tout le mobilier que mon T2 ne pouvait recevoir.
Il apporta le reste de ses affaires chez moi, chez nous désormais, du moins tout ce que l'appart absorber. Je n'avais pas beaucoup de meubles à moi, juste l'essentiel mais j'ai fait quelques cartons que j'ai descendus à la cave pour lui faire de la place.
Le prêt bancaire de la voiture de sa mère étant couvert par une assurance, Charles l'a conservée. J'ai trouvé pour elle une place de parking dans la résidence après d'un vieux voisin qui n'en avait plus l'usage. Notre vie de couple commençait à se construire, bancale. Les deux semaines de vacances passèrent très vite. On ne se retrouva libéré de presque toutes les formalités qu'à la veille du dernier week-end, après presque trois semaines de vie commune, la première à l'étranger, très sensuelle, les deux autres très différentes malheureusement mais pas moins intimes au demeurant.
Les contingences pratiques du quotidien ont nécessité un rodage : non, il ne suffit de mettre son linge sale dans le panier pour retrouver ses vêtements propres et repassés dans l'armoire. Je suis son mec mais pas sa bonne ! Mais au final, Charles, n'est pas qu'un beau mec, il est aussi très doux et surtout très gentil. La vie avec lui au quotidien est très facile, même si parfois certaines de mes remarques provoquent chez lui un froncement de nez accompagné d'un léger soupir qui me font craquer à chaque fois et finalement céder sur à peu près tout : je ne veux rien ajouter à son mal être et aussi je ne sais rien lui refuser. je crois bien qu'il me mène par le bout du nez. Alors je prépare les repas, entretiens l'appart et le linge avec son aide, quand il y pense. Notre relation n'est forcément plus la même, moins charnelle, mais comme enrichie d'une infinité de petits riens.
Je sais combien que son deuil est difficile, il lui arrive de se réveiller la nuit en hurlant, tant ses cauchemars le torturent. Je tente de le rassurer lorsque le temps d'un instant, il ne sait plus où il est, que les lieux lui semblent inconnus, et plus douloureux pour moi, qu'il me regarde comme un étranger. Je vois bien aussi qu'il lui arrive de lutter contre le sommeil de peur de retrouver ses démons. Alors je mobilise toute ma patience, pour cet homme qui partage ma vie désormais et pas seulement mon lit.
Le samedi soir à de notre dernier week-end avant la rentrée nous allons passer la soirée en ville pour la première fois depuis la disparition de sa mère et pour un simple restau-ciné, une tentative de diversion. Une fois rentrés à l'appart et Charles me dit :
- Donc maintenant Julien, tu sais tout de moi, jusqu'à mes dernières vaccinations, puisque qu'on a déménagé jusqu'à mon carnet de santé. Mais moi, je ne sais pas grand chose à ton sujet, mis à par que tu le mec de ma vie et que je tu m'as recueilli. Pour ça je te suis redevable.
- D'abord tu ne m'es pas redevable, le jour où tu voudras partir, je te promets de t'accompagner dans ton départ, comme je 'ai fait pour ton arrivée ; saches bien que tout ce que j'ai fait pour toi, je l'ai fait pour moi aussi. Tu ne réalises pas à quel point tu es devenu important dans ma vie alors t'inviter à la partager, c'était comme une évidence. Je n'ai rien calculé, rien anticipé, les choses se sont faites naturellement. Et puis si tu le voulais, tu pourrais avec le capital que ta mère t'a laissé, vivre en toute indépendance pendant quelques temps. C'est pourquoi, j'aime à croire que c'est aussi ton choix. Je préfère penser que je t'ai accueilli, pas recueilli. Donc pour répondre à ta question j'ai 25 ans (bientôt 26 en fait : le 21 mai prochain) je suis B positif et je ne sais pas trop si mes vaccins sont tous à jour ! Tu as raison je devrais en parler à un médecin.
- T'es con !
- Que veux-tu savoir d'autre ? Demande...
- Ben tout.
- ça fait sans doute trop pour ce soir.
- Comment t'as compris que tu es gay par exemple ?
- Peu à peu en fait, ça n'a pas été immédiat, mais ça c'est plutôt imposé à moi. Tu sais, je suis né à XXX une petite ville ouvrière, et j'ai grandit dans une famille aux vues très traditionnelles. Pour mes parents la vie c'est travail, mariage, enfants, vacances à la mer : un schéma très conventionnel, tu vois. Pourtant j'ai eu une enfance heureuse, mes parents étaient prévenants. Mes grands parents très présents aussi quand j'étais petit. L'école était très importante pour mon père qui aurait voulu être instituteur. Et donc si je suis enseignant c'est sans doute parce qu'il ne l'était pas.
J'étais un enfant rêveur toujours dans mes livres, ou perdu dans mes pensées pas du tout attiré par les jeux des garçons de mon âge, je n'aime pas particulièrement le foot ce qui limitait les échanges dans la cour de récréation ! Assez solitaire donc surtout pendant mes années collège.
Puis au lycée, j'ai eu des bonnes copines et un vrai premier amour pour Annie mais qui n'était pas partagé, une déception qui m'a replongé dans ma solitude surtout quand mes copains de classe m'ont chambré pour le râteau que je m'étais pris. J'ai réalisé a postériori que cet amour que je croyais profond était sans doute fondé sur le besoin de faire comme tout le monde, bref d'avoir une copine, alors qu'en réalité Annie était une véritable amie, ... qui en pinçait pour un autre.
A partir de la seconde, j'ai été attiré par la physique chimie et logiquement après donc mon bac j'ai fait deux ans de prépa scientifique avec, comme corolaire, la découverte de la vie en internat et des contraintes de la vie en chambrée. Tu n'y as plus aucune intimité. Tes camarades de chambre connaissent jusqu'à ton stock de papier toilette !
C'est alors, dans cet univers masculin, que j'ai commencé à être subjugué par le corps de certains de mes camarades internes, la promiscuité des douches favorisant un certain voyeurisme ; c'est là que j'ai pu constater que la nature n'est pas équitable dans la répartition des attributs masculins. Si je trouvais certains très insipides, les proportions parfaites du corps d'Olivier me faisaient rêver. Il était brun, le corps imberbe, les pectoraux bien développés et je le trouvais très craquant avec son sexe niché au milieu d'une touffe noir de jais. Je me serais bien vu jouer avec, je me faisais des films quoi. Je n'avais pas dû être discret quand je le matais car un jour, un mercredi après midi alors que l'internat était vide à l'heure du quartier libre, et alors que j'en profitais pour prendre une douche tant qu'il y avait de l'eau chaude encore, il m'attendait. En arrivant ans la salle d'eau, je le vit se pavaner, nu sous mes yeux qui le dévorèrent immédiatement. Il m'a souri d'un sourire ambigu, a pris sa bite en main et m'a dit " allez, tiens, suce, elle t'attend" sur un ton de provocation teinté de mépris qui a brisé mes rêves de relation romantique. Décontenancé, j'ai haussé les épaules et je suis rentré me réfugier sous la douche essayant de cacher un début d'érection et aussi pour fuir cette demande que je ne savais pas gérer. Comme nous étions seuls à l'étage Olivier m'y a rejoint, a commencé à me toucher. Je n'ai rien dit. Il a saisi ma main l'a guidée vers son entrejambe et m'an intimé " branle-moi ". Ce fut ma première bite. J'ai aimé le contact de sa peau, la rondeur de son gland et j'ai adoré jouer avec son prépuce. Je souviens qu'il était raide comme du bois. Il m'a plaqué la tête contre ses pecs et m'a dit " lèche ".
J'ai joué de la langue sur ses mamelons durcis, les ai mordillé, j'ai perdu rapidement la tête. Lorsqu'il a appuyé sur mon épaule pour me faire descendre, docilement je me suis agenouillé pour essayer mon nouveau jouet, adorer mon nouveau dieu. Je l'ai léché, sucé, branlé jusqu'à ce qu'il me relève, me retourne avec force, me plaque contre le mur faïencé et me pénètre brutalement. J'ai crié, de surprise et de douleur mais il n'a rien entendu et il m'a besogné sans autre préoccupation que son propre plaisir. Il a fini par me lâcher et je me suis effondré dans la douche : il me soutenait plus. Il s'est fini sur mon visage, mécaniquement, égoïstement, en extériorisant son plaisir bruyamment puis il a quitté la douche avec ses mots :
" Alors ? Heureux ? T'a kiffé, avoue ! " et il m'a laissé là, tout à ma solitude. Même si je fantasmais sur ce mec, si j'avais aimé le sucer, sa pénétration trop brutale, sans préparation et sans partage, m'a laissé l'amertume d'avoir été juste un objet pour lui.
J'ai fait une croix sur Olivier. Tu vois, Charles, vivre son fantasme n'est pas toujours un rêve ! Il ne s'est plus jamais rien passé entre nous. J'ai fini ma deuxième année et j'ai réorienté mes études vers la fac où j'ai pu obtenir une chambre en résidence universitaire, au moins j'y ai gagné en intimité.
- En bien, Julien, ça ressemble beaucoup à un viol, me murmure Charles
- Pas vraiment parce que j'étais consentant : ce mec je le voulais. Il l'avait compris et en a profité mais il n'était pas homo, bi sans doute. Il m'a utilisé comme exutoire à sa tension sexuelle. En fait, j'ai eu en partie ce que je cherchais, mais lui ne cherchait qu'une récréation sexuelle : nous n'étions spas sur la même longueur d'onde.
- Eh ben, j'ai eu de la chance de ne pas vivre ça.
- Je ne suis pas cet Olivier. Je ne suis pas le consommateur de plans d'un soir, je te l'ai déjà dit. Je suis un incurable romantique. Un cérébral. On dit que les hétéros ont le cerveau à la place du gland, ça doit être pour ça que je suis pédé.
- Moi, j'ai envie de toi, maintenant Julien, baise moi s'il te plait, ça fait trop longtemps et j'en ai trop envie.
- Moi, j'ai trop envie de faire l'amour avec toi, Charles, je t'aime. Ces derniers mots je les prononce sans y avoir pensé, du plus profond de mon être.
Nos corps se retrouvent, hésitants encore après une trop longue attente. Mais bien vite la passion nous anime, nous jouissons longuement, l'un par l'autre, dans une étreinte d'une telle sensualité qu'il est presque impossible de la transcrire sans la trahir.
Kawiteau
Autres histoires de l'auteur : Jean | Charles et Julien