C’est une chose curieuse que la mémoire.
Pourquoi, aujourd’hui, alors que le temps est maussade et que le vent d’est me tape sur les nerfs, m’est-il revenu en mémoire jusqu’à m’obséder cette nuit magique passée avec Noah ?
C’était notre premier été ensemble. Nous étions étudiants et nous avions prévu de passer une dizaine de jours dans un vieil appartement de la famille de Noah dans le massif de la Vanoise. Je ne connaissais pas vraiment la montagne et je me revois, depuis le bus qui nous conduisait de Moutiers, découvrir avec les yeux d’un gamin voyant la mer pour la première fois, les grands sapins qui bordaient la route et qui laissaient entrevoir des sommets dont certains couverts de glaciers. Il existait un tel paradis et je ne le savais même pas.
Noah, lui, avait passé toutes ses vacances ici. Il connaissait ces montagnes comme sa poche et leur portait un respect qu’à l’époque j’avais du mal à comprendre.
Dés le lendemain nous partions en montagne sac sur le dos sous un soleil de plomb. Je suivais Noah avec peine. Je suis assez sportif mais lui était plus rompu à cet exercice d’apparence si simple qui consiste à marcher en montagne en gardant un rythme régulier. Sorti de la forêt, le soleil me faisait également souffrir. Peu après la pause déjeuner, nous avons quitté le sentier principal pour prendre une sente à peine marquée. Je laissais Noah guider, me concentrant sur mes pas pour avoir une marche plus fluide qui, au moins, épargnerait mes épaules. J’étais avec mon mec, nous étions seuls dans un décor d’une beauté incroyable bien qu’austère ; j’étais le plus heureux des hommes. Un peu moins de deux heures plus tard, nous sommes arrivés à une cabane. Ce petit bâtiment rustique ouvert à tout le monde, garni seulement d’une table, de quelques chaises et de bas flancs, nous accueillait pour la nuit. Nous avons sorti nos duvets, notre réchaud et sommes sortis refaire le monde sur le vieux banc devant le refuge.
- Le soleil ne va pas tarder à passer derrière les montagnes. Il serait temps d’aller nous décrasser.
Noah avait raison. J’avais beaucoup transpiré et il fallait que je me lave un peu si je voulais dormir.
Nous avons pris nos affaires et rejoins le ruisseau qui serpentait dans le vallon, à une centaine de mètres. J’enlevai short et tee-shirt, trempai mes pieds dans l’eau froide et sortis mon savon.
Quand je me retournai, je vis Noah, nu comme un ver, s’asperger joyeusement au milieu de l’eau. Il jouait comme un gamin. Recroquevillé en slip dans mon coin, je me sentais complètement gauche, et ça l’amusait visiblement beaucoup. Je ne savais plus quelle attitude prendre. Nous formions déjà un couple avec Noah, mais me mettre nu dans la nature me gênait. Je finis par enlever mon slip mais mon malaise persistait. Et, je ne sais pas pourquoi, Noah m’apparut différemment à cet instant. Son sourire désarmant sur son corps de jeune homme, la lumière merveilleuse qu’offrait cette fin de journée sur ses muscles, son corps qui se relâchait dans l’eau après l’effort sans retenue ni pudeur, j’admirais sa beauté, son assurance, et je profitais du spectacle qu’il m’offrait. Je mesurais la chance que j’avais d’avoir un homme comme ça à mes côtés.
Je restais hébété. Mon regard se porta alors sur la fine toison qui court de son pubis à son nombril et c’est, je crois, ce qui déclencha mon érection. Je devins rouge de honte même si, dans le fond, il n’y avait pas de raison. Noah se mit à rire de plus belle.
- Il te reste des forces à ce que je vois !
Penaud, je me retournai.
- Détends toi Math !
Je ne savais plus où me mettre.
- Allez, tu sais, à cette heure là, plus personne ne va venir. D’ailleurs je n’ai jamais vu personne dans ce coin.
Je reprenais péniblement le contrôle de moi-même.
- Bon écoute, je ne vois plus qu’un moyen pour toi de t’en sortir, c’est de me mettre dans le même état.
Tout Noah dans cette phrase : l’élégance de ne rien prendre tout à fait au sérieux.
Il s’approchait en souriant. Je lisais le désir dans ces yeux. Je m’accrochai alors sans réfléchir à ses cuisses puissantes et avalai sons sexe encore partiellement au repos. Il leva les yeux vers le ciel en gémissant et mis ses mains sur ma tête. Assis sur un rocher, l’eau me glaçait les pieds et cette queue me brûlait la langue. Mes mains remontèrent jusqu’à ses fesses et je les serrai avec fureur. La gêne avait laissé la place à une excitation incontrôlable, frénétique, impérieuse. Le sexe de Noah roulait dans ma bouche. Je l’avalais tout entier, la salive affluait. Le sentir prendre de la vigueur dans ma bouche me comblait. Noah se baissa alors pour m’embrasser. Son torse contre le mien, ses lèvres contre les miennes, sous les derniers rayons du soleil, je le voulais comme jamais je ne l’avais voulu, le pressant contre moi, agrippant son cul, son dos, son sexe, ses couilles, ses cuisses, tout ce que je pouvais, le corps entier tendu d’excitation brutale. Je me retournai contre le rocher pour m’offrir.
- Noah, je te veux.
Il ne se fit pas prier. Il enduisit mon cul de salive autant qu’il le put et je le sentis s’introduire en moi pour la première fois sans capote. Je fus surpris par cette sensation d’intimité ultime que je n’avais encore jamais connue et, bien que rapide, ce fut éblouissant. Chaque coup de butoir me mettait en transe. Cet homme qui prenait possession de mon corps sans ménagement me comblait. Lorsque ses couilles frappaient mes cuisses, je criais de plaisir. Dans une ultime contraction il s’enfonça au plus profond, et je sentis son sperme me remplir. A nouveau, sensation nouvelle et puissante de fusion. Le souffle cours, je serrai instinctivement les fesses pour le retenir. Quelques spasmes nous agitèrent encore et finalement nous nous sommes littéralement affalés dans l’herbe pour nous enlacer sous les ultimes rayons du soleil. Il nous fallut un peu de temps pour reprendre nos esprits.
C’est finalement le froid qui nous poussa à rejoindre notre petit refuge.
Nous avons alors mangé sans rien dire, par crainte sans doute de rompre l’instant. Une petite toilette plus tard, nous nous sommes alités dans nos duvets sur les lits qui sentaient le renfermé. Malgré l’inconfort du lieu, il ne nous fallut pas longtemps pour sentir le désir revenir. Noah me suça un peu avant de venir s’empaler sur moi. La lueur des lampes frontales faisait danser les ombres de nos corps entremêlés sur le crépi grossier de la cabane. Noah me regardait et l’amour que je lisais dans ses yeux me combla. Cette fois, la fureur et ce sentiment d’urgence qui nous avaient poussés violemment l’un sur l’autre l’après-midi nous avaient quittés et nous désirions plutôt faire durer le plaisir. Noah dansait sur moi doucement tantôt en caressant mes boules, tantôt en prenant appui sur mon ventre, s’appliquant à me donner du plaisir, faisant disparaître mon sexe dans son cul, sa queue s’agitant devant moi. J’ai encore dans l’oreille le grincement des vieilles planches qui formaient le sommier accompagner en cadence notre respiration bruyante jusqu’à la libération.
Nous nous sommes alors endormis lui sur moi.
Il m’a réveillé dans la nuit. Il voulait me montrer la voie lactée. Spectacle incroyable que ce ciel pur sans lune et pourtant lumineux d’étoiles par millions, difficile à décrire pour ceux qui ne l’ont jamais vu. Je ne saurais dire combien de temps nous sommes restés ainsi, les yeux vers le ciel. De retour dans la chaleur douillette des duvets, Noah me caressa avec douceur et je lui rendis ses caresses. Nous avions à nouveau envie l’un de l’autre. Nos sexes se frottèrent. Nous nous sommes sucés et branlés mutuellement longuement avant de nous rendormir, cette fois jusqu’au lendemain matin. Au réveil, tandis que je mettais l’eau du thé à chauffer sur le gaz, il m’appela pour me prendre encore doucement en cuiller.
Il nous fallut pourtant redescendre. L’ascension que nous avions projetée fut bien sûr remise à une autre fois. En fermant les yeux aujourd’hui, je peux encore sentir l’odeur de nos transpirations mêlée à celle de fumée de la cabane. Cette soirée et cette nuit sans sommeil ou nous avons fait l’amour, d’abord brutalement puis plus langoureusement, a scellé pour longtemps notre union. Plusieurs fois nous avons projeté de retourner dans cette cabane, mais, à chaque fois, nous y avons renoncé, sachant trop bien que nous ne pourrions qu’être déçus. Nous préférons garder pour nous ce souvenir comme un trésor précieux et réconfortant, et nous l’évoquons toujours avec émotion.
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Tête de brique
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