Chapitre -01 : Avant que ne soit ce qui est, il y avait...
L'Angoisse
Elle a toujours fait partie intégrante de ma vie. Je n'ai jamais eu confiance en moi, jamais envisagé de vivre sans. Jusqu'à mes 22 ans, j'ai porté ce fardeau au point de ne même plus remarquer son poids écrasant, qui affectait pourtant chaque jour de ma vie.
Il y avait les périodes calmes, où je pouvais passer des journées entières, relativement tranquilles, et les périodes dures, où je faisais au minimum deux crises par jour.
Avec le temps, les périodes calmes ont perdu du terrain au profit de leurs rivales, tant et si bien que j'en suis venu, une fois, à envisager de mettre un terme à cette vie de mal-être.
Certains se seraient réfugiés dans l'amitié, mais j'ai toujours été du genre à avoir peu d'amis, et les derniers m'avaient abandonné, me trouvant trop " bizarre ".
Certains se seraient réfugiés dans l'amour, mais à cette époque, je ne savais pas ce que j'aimais. J'avais eu une copine, mais je n'étais pas heureux dans cette relation, et je l'avais quittée. Je savais inconsciemment que j'étais attiré par les hommes. Quand vous regardez un film contenant une scène nue, mais que ce n'est pas la femme qui attire votre regarde et réveille votre entrejambe, c'est un sacré signe ! ^^
Le problème, c'est que dans mon petit lycée de campagne, il n'y avait que deux gays connus. Aujourd'hui je n'appellerai même pas ça des gays, mais plutôt des caricatures.
Deux créatures efféminées et grotesques, riant à gorge ouverte, agitant la main en parlant, affublant chacun d'un petit surnom, se prenant pour les " reines " du coin. Deux personnifications de la honte à mes yeux, et je ne pouvais pas m'imaginer gay si cela signifiait ressembler à... Ça.
Je vois d'ici certains d'entre vous dire que je ne suis pas tolérant, mais que les choses soient claires : je suis gay. Par conséquent, j'aime les hommes, et non les hommes qui se prennent pour des femmes.
J'ai donc fini le lycée en refoulant ma sexualité, puis je suis allé à la fac, à Lyon. Là-bas, l'Angoisse s'est diluée dans la routine étudiante, ne refaisant surface qu'à certains moments.
Jusqu'au jour où je l'ai mis K.O. de la manière la plus inattendue...
Avec des amis de promo, nous avions planifié une soirée dans un bar appelé " Les Fleurs du Malt " vous l'aurez compris, la bière allait couler à flots (enfin sauf pour moi ^^).
En arrivant, nous étions quatre, mais nous avons croisé la bande de potes d'un de nous, et de fil en aiguille, nous nous sommes retrouvés à neuf à discuter en braillant et en buvant.
Durant la soirée, un des gars de l'autre bande qui était à côté de moi a commencé à discuter avec moi, me posant des questions bateaux sur mes études, mes hobbies, puis de plus en plus personnelles. Je répondais volontiers à ses interrogations tout en lui posant moi aussi des questions.
À la fin de la soirée, je le saluais chaleureusement avant de courir avec mes potes pour attraper le dernier métro. Une fois dans la rame, Noémie, une fille du groupe, me tendit un morceau de papier.
- Qu'est-ce que c'est ?
- C'est le numéro de Célien.
- Hein ?
Elle me sourit d'un air à la fois désabusé et amusé.
- J'en étais sûr t'as rien remarqué ! C'est quand même fou !
- Bon bah, crache-le ton morceau, j'ai raté quoi ?
- Un mec te drague une soirée entière, et toi, tu ne réalises rien ?
Je sentis brusquement le rouge me venir aux joues. Putain qu'il faisait chaud dans ce métro !
- Arrête tes conneries...
- Y a pas de conneries Renart ! Il faisait peine à voir à te tendre des perches sans que tu voies rien... Du coup quand on est retourné chercher des bières, je lui ai dit que t'avais un restant de ton côté asocial et que t'étais du genre à avoir un peu de latence avec les gens...
- Trop aimable, je suis conquis...
- Ne râle pas. Il m'a donné son numéro pour que je te le donne au cas où... Il a visiblement bien fait. Et puis il est beau gosse non ?
Je crevais définitivement de chaud dans cette rame bondée et bafouillais une réponse du style :
- Bah... Je ne sais pas moi... Oui... Enfin, je ne sais pas... Peut-être... Je suppose...
Bon, rétrospectivement, je vais être honnête, il était hyper beau. À l'exception d'un petit détail qui me dérangeait un peu (à mon goût) : il avait les dents du bonheur. Sinon rien à jeter pour ce que j'avais vu !
En arrivant chez moi ce soir-là, je n'avais aucune envie de dormir. Je me sentais vibrer comme si chaque cellule de mon corps ne tenait plus en place. J'avais presque l'impression de me sentir mal, et pourtant, je me sentais incroyablement bien.
Moi qui avais pendant longtemps fait tapisserie aux yeux de mes camarades, voilà que je me faisais aborder par un beau gosse sans même m'en rendre compte.
Ne tenant pas compte de l'heure, j'ai attrapé mon portable, et j'ai fait le numéro de Célien.
Après une unique sonnerie, il a décroché.
- Allô Renart ?
- Euh... Oui.
- Un numéro inconnu à cette heure, je ne voyais personne d'autre haha. Je suis content que Noémie t'ait donné mon numéro.
Je ne sais pas si c'était psychologique, mais sa voix me paraissait incroyablement envoutante maintenant.
- Oui, apparemment, je n'ai pas été très perspicace ce soir...
- Doux euphémisme, tu as même été un gros boulet ! Il aurait fallu que je te roule une pelle pour que tu saisisses mes intentions ?
- Quand même pas non, mais je ne comprends pas en fait.
- Quoi donc ? Que je puisse craquer sur un beau petit rouquin comme toi ? Tout est dit !
- Dans la catégorie des boulets, je me pose là putain... Suite dans un prochain épisode ?
J'avais dit cette phrase plein d'espoir, en espérant que ça ne s'entendrait pas trop.
- La diffusion est prévue demain à 17 h sous la statue Louis XIV à Bellecour. Sois à l'heure et assure-toi de ne pas trop avoir de latence cette fois !
- Je vais voir ce que je peux faire, répondis-je en riant.
- J'adore ton rire petit rouquin ! Allez, à demain alors, bisous !
J'étais sur le point de répondre, mais il avait déjà raccroché.
Comment étais-je censé trouver le sommeil après ça ?! Eh bah... Figurez-vous que je me suis écroulé comme une masse haha.
Et le lendemain...
À suivre :)
Merci encore à ceux qui m'écrivent, ça me fait vraiment super plaisir de vous lire.... Quand c'est constructif ! Ceux qui incendient et ne répondent plus, ce n'est pas la peine ;).
Je précise encore une fois que tout est réel, juste un peu romancé par moment, mais j'essaie d'éviter et de coller au plus près de la réalité.
Pour ceux qui se le demanderaient, cette histoire se déroule avant S et tout ce qui a suivi :)
Si vous êtes de Lyon ou des environs, n'hésitez pas ! Même si vous êtes d'ailleurs, je réponds à tout le monde.
Renart
renartraner@gmail.com
Autres histoires de l'auteur : M | Incipit | L'éveil du Renart | Nils | Gabriel | Tony | Détente au Sun City