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Les correspondances de Marc & Cyril
Le 4 juillet 2019, La Bastide
Marc,
J'ai voyagé dans tes transes au pays du vent bleu. J'ai tout vu, j'ai tout senti, tout gouté jusqu'au gout de sang et de sperme mêlés dans ma bouche. J'entendais même jusqu'au tambour, aux rires sataniques et plaintes bestiales. Ce fut si réel que je veux bien y croire, c'est ancré.
J'ignore tes recommandations et les sorts en retour (ceux de ta puissante et éternelle reine en décomposition) en publiant cette histoire personnelle, qui ne le sera plus.
Ceux qui lieront seront comme moi transportés, envoutés, seul ton unique talent jaillira, éclipsant tout mon ressenti.
Je suis bien entendu jaloux de toute cette magie qui me saute à la gueule et se fond en moi.
Et pire...
Comme un voyeur qui a vu la scène la plus fantasmagorique, même au delà son imagination, de sa créativité, je me suis retourné sur moi et le vertige m'a aspiré puis fait sombrer dans mon vide sans fin.
En fin de chute, je me suis éclaté sur l'horrible désir de n'être maintenant que le témoin de ta légende.
Moi en ombre, en retrait, au mieux le charognard de tes festins orgasmiques, si tu veux bien me nourrir un peu.
Si un jour, toi tu mourais, je pourrais continuer à vivre seulement en ton apôtre et raconter ton odyssée.
Je ne suis pas de ceux qui rêve d'être jetés à l'abattage, mais que ta volonté soit faite, envoie Coblan et ses sbires assouvir leur sauvagerie sexuelle sur moi, en moi, se serait comme un don de dieu puisque ta volonté.
Puisque c'est tout ce que tu m'offres en réalité, cette réalité que les gens de ma génération ont tant besoin de modéliser.
Je le répète, c'est tout ce que tu m'offres.
Un soir tu as fait cinq violents allers et retours dans mon cul, un autre jour, un câlin pour évaluer ma rancoeur bien volatile et quoi d'autre ?
Tu n'as de cesse de m'emmener dans ta nostalgie, si féérique puis ensorcelée soit-elle, j'ai souvent la sensation du deuil immense que tu n'arrives pas à faire. C'est ton fardeau et tu me le fais porter.
Même si je le voulais, je ne pourrais pas te rejoindre dans tes vies ancestrales et te sauver.
Dans le présent, je te contemple, tu m'observes, je tombe dans chaque piège que tu as posé entre nous.
Je dois m'en libérer seul, vite, sans intelligence, juste par instinct tellement l'animal souffre d'être capturé dans tes dispositifs de torture.
Je souffle sur ma plaie. Mon souffle de vie est plus fort que ceux du vent bleu.
Je vais partir.
Pour moi, pour toi aussi... car ma soumission, ma béatitude, mon admiration passive et paralysante me rendrait complice de ce malheur qui t'enferme dans le passé.
Je pars, mais je ne t'abandonne pas, je ne peux pas.
Raconte-moi tes voyages initiatiques, ta passion dévorante, la perte du tout. Pourquoi des grilles infranchissables se sont érigées et t'enferment dans ce deuil ?
Plus terre à terre : Je prends ton cabot alcoolique avec moi, j'ai grave envie de baiser (c'est sans rapport), j'ai laissé la corde qui me servait de ceinture pour que tu puisses te pendre si tu décidais de m'oublier, vivre serait trop incohérent.
À bientôt, noir sur blanc dans tes nuances.
Cyril
Cyrillo
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