Premier épisode
2 | Il suffit de passer le pont
Le récit de Julien
Les moissons sont terminées et c’est le creux d’activité de l’été ... On doit être en … 2009. Le patron est parti, je ne sais où, endosser quelques responsabilités d’élu consulaire, la patronne est en bord de mer, Adrien poursuit ses études au loin, je suis entré dans la quarantaine ...
Comme tous les étés maintenant, je suis le maître des Chênaies.
Je vais faire une course au bourg et passe devant la Maison de la Presse. J’entre pour jeter un œil aux revues. Ouf ! c’est Colette qui est à la caisse et Patrick n’est pas en vue. En revanche, je croise LE fils unique. Ici, je cède un peu gratuitement à la facilité de la moquerie car Cyrille a toujours été parfaitement correct avec moi. Et cette fois encore, il me salue courtoisement d’un large sourire et me regarde bien en face, quand tant d’autres se détournent.
Après quelques hésitations, j’achète un magazine puis je rejoins la voiture pour rentrer tranquillement. A la sortie du bourg, j’aperçois une silhouette d’homme qui marche sur le bas côté, j’actionne mon clignotant pour le dépasser mais il se retourne vivement vers la voiture. Tiens, c’est Cyrille ! Il incline son buste sur la chaussée en faisant de grands gestes des bras, me fixant au travers du pare-brise. Intrigué, je m’arrête et, en deux pas rapides, il a ouvert la portière et se coule dans le siège passager.
- « Démarre, s’il te plaît ! »
J’obtempère, mi amusé, mi intrigué par cette situation imprévue et j’énonce la première banalité qui me vient à l’esprit.
- « Tiens, tu marches à pied plutôt que de conduire, alors que tu as maintenant ton propre véhicule orné un joli A rouge ? »
Cyrille ne rétorque rien, regarde fixement devant lui mais subrepticement, il vient couler délicatement sa main sur ma cuisse droite.
Je pouffe.
Et, en avalanche, je me dis alors qu’il n’est pas là, sur cette route, par hasard, qu’au nez et à la barbe de tous les bien-pensants, ni vu ni connu, il s’est embusqué pour me rejoindre discrètement, que ses jolis sourires francs avaient un double sens, que c’est bien ma cuisse à moi, Julien le scandaleux, que ce fils de famille, tellement choyé, protégé, gâté, envié, caresse en tremblant un peu, qu’il est désormais majeur … Alors, sans plus réfléchir et avec un petit rire, je cède à la joie un peu naïve d’avoir été choisi et de jouer un bon tour aux croquants.
Je laisse tomber ma paluche sur la sienne que j’étreins quelques secondes puis, après l’avoir fixée à cette place, je ramène la mienne sur le volant et poursuis ma route calmement.
Mais du coin de l’œil, j’ai saisi son sourire quand il a tourné la tête vers moi.
Arrivé aux Chênaies, je gare l’utilitaire sous le hangar, coupe le moteur, sors du véhicule et me dirige à grands pas vers la vieille écurie, Cyrille sur mes talons.
Alors dans l‘ombre propice traversée de rais de lumière où volettent des myriades de poussières dans l’air déjà lourd , je me retourne d’un bloc, l’attrape à deux mains par le paletot et le colle presque rudement à la paroi de paille. Les avant-bras ouverts à l’équerre, je l’encadre de mes poings serrés encastrés dans la botte contre laquelle il s’adosse. Puissamment penché vers lui, le visage à le toucher, je le harponne de mes yeux durs qui le questionnent silencieusement.
Les siens sont écarquillés, ses paupières papillonnent désespérément. Sans doute l’ai-je -volontairement, car il ferait beau voir qu’il cherche à se jouer de moi- quelque peu déstabilisé. Il bascule d’un pied sur l’autre, s’ébroue comme pour vérifier qu’il reste libre de ses mouvements dans la cage de mes bras puis, en hésitant, il tend légèrement le cou et ses lèvres viennent effleurer les miennes. Elles s’immobilisent à mon contact et je sens son souffle, court, sur mon visage. Je ne bouge pas d’un cil. Puis je perçois un nouveau frémissement, encore une tentative.
Brusquement, pour que mon changement d’attitude lui soit clairement perceptible, je casse nettement mon cou. J’entrouvre mes lèvres, la pointe de ma langue venant les affleurer. Illico, la sienne tente de s’y engouffrer avec élan et je cède progressivement à son baiser brouillon et haletant. Je crois entendre les coups sourds de son cœur dans sa poitrine.
Je me recule et l’abandonne soudain, désarçonné, les lèvres humides, les sourcils froncés et l’œil suppliant alors qu’il pensait probablement avoir emporté la mise. Ma main vient épouser sa gorge, mon pouce relevant son menton et je me penche alors sur lui dont le souffle se précipite et les yeux se ferment déjà, pour lui rouler un palot d’anthologie avec lèvres gourmandes, langue invasive et tutti quanti.
Mais il se révèle presqu’inerte, un danseur empêché dont les pieds s’entremêlent et s’empêtrent, incapable de comprendre mes indications probablement trop élaborées, de suivre la mesure et une évidence se fait jour en moi. Je glisse alors à son oreille.
- « Tu n’as jamais … ? »
Il réussit à tourner la tête latéralement en signe de dénégation et j’insiste :
- « Et que veux-tu ? »
- « Encule-moi ! »
- « Brr ! Quel vilain mot pour une première fois ! Je crois que ton courage que je salue, mérite beaucoup mieux … Déshabille-toi ! »
Et tandis que s’empressant d’obéir à mon ordre sec, il fait voler un à un ses tennis de la pointe d’un pied puis cliqueter sa ceinture avant de danser d’un pied sur l’autre afin que pantalon et boxer s’écroulent à ses chevilles, j’entoure sa taille à deux mains pour soulever son tee-shirt que je passe par dessus sa tête. Je l’enveloppe de mes deux bras en le serrant contre moi, le nez dans son cou pour emplir mes poumons de sa douce odeur de jeune homme propret et bien élevé.
Mais sacrément culotté ! Même s’il connaît, et de réputation uniquement !, à quoi me portent mes goûts, il a pris un risque énorme qui me fait réviser l’opinion simpliste que j’avais de lui. Alors je décide de lui offrir un dépucelage de quatorze juillet.
Je l’attrape par un poignet et l’entraîne sans ménagement à la recherche d’une alcôve jonchée d’un épais matelas de paille où j’étale quelques vieilles couvertures … comme à mes propres débuts ici ! Mais j’écarte rapidement toute nostalgie et me tourne résolument vers lui.
Un joli garçon à la mine avenante, aux cheveux châtains sagement coiffés, aux doux yeux noisettes. Pas très grand, je dirais un mètre soixante quinze, un corps encore immature mais plus athlétique que sa réputation d’enfant surprotégé nous le laisserait à penser ; la peau claire avec deux couronnes de fins poils clairs, presque blancs entourant ses aréoles et un filet du nombril au pubis à la toison soigneusement taillée puis les cuisses couvertes d’un duvet bouclé qui devient étonnamment dense et foncé sur ses solides mollets musclés.
Il a légèrement rougi sous mon examen de maquignon mais quand je ramène mon regard dans le sien, il sourit. Sans doute a-t-il perçu que je n’allais pas le renvoyer, couvert de ridicule et la queue basse mais plutôt accéder à sa requête.
Oui, j’allais lui faire franchir ce pas, cette transition qui nous fait entrer dans l’âge adulte par la sexualité génitale. Mes hormones bouillonnent et ma bite se dresse déjà à cette perspective.
Amical72
amical072@gmail.com
* « Autrefois, quand j’étais marmot / J’avais la phobie des gros mots / Et si j’pensais " merde " tout bas / Je ne le disais pas » A propos de l’exquise politesse
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