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10 | Déclaration officielle – Le récit de Julien.
La porte s'est ouverte à la volée, faisant entrer dans la maison une grande bouffée de l'air plus frisquet du dehors. Je lève les yeux de ma préparation culinaire sur le large dos de Jérôme qui se penche pour la refermer avec soin. Il se retourne, rayonnant, écarte les bras en croix comme un prédicateur sur une estrade.
- "Ça y est ! Cette fois, je suis pédé."
Interloqué, je le regarde avancer sur moi d'un pas décidé. Sa main vient envelopper ma nuque, il m'attire fermement à lui pour un baiser de glouton, langue impérieuse et bouche ventouse qui me laisse à demi asphyxié.
Il a décollé ses lèvres des miennes sans lacher la pression de sa main à mon cou et me regarde fixement à trente centimètres de distance d'un air concentré qui me fait sourire.
- " Officiellement pédé."
J'attends, serein, l'explication à suivre qui ne devrait pas manquer. Ce matin, il m'a planté avec la bite au garde à vous sous la douche, prétextant qu'il avait quelque chose d'important à faire au boulot, qu'il se sentait désormais assez fort pour assumer sa liberté.
Alors j'attends.
Il exhale un profond soupir faisant effondrer ses épaules, de ceux qui chassent au loin ce dont on vient de se débarrasser au prix d'un effort sur soi. Il m'apostrophe sèchement du menton.
- " Tu fais quoi, là?"
Sa voix est de celle qui ne tolèrera aucun contretemps dilatoire. Amusé, je brandis la cuiller en bois que j'ai gardée à la main et son bras retombe de mon épaule, comme désarmé.
- "La soupe, comme tu vois. J'ai fait fondre le poireau, mouillé avec le bouillon et je m'apprêtais à ajouter les carottes et deux pommes de terre puis ..."
- "On baise, Julien."
Le ton est péremptoire mais un léger tremblement résonne comme une sirène d'urgence à mon oreille. Pour autant, je poursuis ma tâche sans me détourner.
- "Tu m'expliques?"
- " Plus tard. On baise d'abord."
Sa main est venue se poser légère comme un oiseau à mon épaule ; je tourne vivement la tête vers elle, la crédite d'un bisou d'acompte et lui d'un bref coup d'oeil avant de retourner posément à mes légumes. Je touille en surveillant la reprise de l'ébullition, je goûte, j'ajoute une pincée de cumin et une pointe de paprika, baisse le feu sous la marmite à frémissement, je la couvre, veillant à ajuster imparfaitement le couvercle pour que l'excès de vapeur puisse s'échapper.
Quand, enfin, je me retourne vers lui, Jérôme se coule dans mes bras et m'enferme dans les siens.
- "Merci, Julien."
Mais ce n'est plus le même Jérôme. C'est maintenant un Jérôme au corps souple et ondulant : son cou s'arque, ses yeux se ferment et ses lèvres viennent cueillir les miennes, sa langue se coule à la rencontre de la mienne comme un flot de rubans, dans un ronronnement de chat calin. C'est un Jérôme qui s'abandonne entre mes mains en toute confiance, qui me délègue de veiller sur lui, dans une étreinte qui ... le soutient? Le réconforte? L'apaise? Le restaure? Si je ne sais pas "pourquoi", je crois avoir parfaitement compris ce qu'il attend de moi.
- "Toi, tu as besoin que je prenne soin de toi."
Même si le contrat tacite semble limpide, pourquoi ne pas le verbaliser pour s'en assurer? Il ne répond pas ? C'est qu'il s'épargne pudiquement ce dévoilement mais il se laisse conduire sans manifester la moindre résistance, se laissant déculotter comme un enfant sage.
Quand je soulève son tee-shirt à deux mains, dévoilant la prairie de son ventre, puis celle de son torse, le forçant à relever les bras, ses aisselles s'ouvrent comme des coquillages nacrés. Je fonds sur les toupets flamboyants et odorants qu'une raie nette partage d'un trait blanc, mon nez s'empare de ses effluves d'homme sans cesse en mouvement pour s'en régaler et mes lèvres happent puis suçotent ses petits tétons durs dressés dans la broussaille de son torse. Mais quand ma bouche cascade sur son ventre alors que mes mains libèrent son sceptre avec toutes les précautions dues à ce bel outil, la sienne me retient.
Achevant de se libérer de ses dernières frusques, il me souffle :
- "Prends-moi."
Puis, posément, il s'allonge nu sur le matelas, me présentant le dos.
Alors, devant le grand corps alangui de cet homme puissant qui s'abandonne après qu'en vainqueur il ait triomphé de l'épreuve, ce corps étendu sur la crête duquel je fais courir le bout de mes doigts, léger comme un souffle d'air, je savoure le désir qui monte en moi, augmenté de l'envie de le serrer dans mes bras pour l'entourer de ma chaleur, de plonger souplement en lui pour le compléter et nous fusionner.
Je sens également une responsabilité qui pèse sur mes épaules, celle de conduire ce qui va nous emporter jusqu'à l'éblouissement, un éclair de fraternité qui écartera, pour un instant, le froid, le noir, la solitude dans une fugace illusion d'éternité.
En un instant, j'ôte tous mes vêtements avant de capoter soigneusement mon rostre qui me parait coulé dans le bronze le plus dur puis je me retourne vers Jérôme. Il a décalé sa jambe supérieure qu'il a repliée jusqu'à ce que le galbe du mollet de la jambe du dessous arrête son cou-de-pied, entrouvrant la base de ses fesses en un triangle broussailleux à reflets dorés.
Je me penche pour embrasser l'éminence de sa hanche et il lance un bras vers l'arrière, la main ouverte, tentant de se saisir de moi mais j'esquive et la mienne vient recouvrir la fente qui partage ses rondeurs et nous en indique les attraits ; mes doigts y basculent pour l'enduire de gel et, quand je m'allonge à son côté, mon majeur y fore sa voie sans rencontrer la moindre résistance. Aussitôt, mon index se joint à lui pour détendre le sphincter d'un Jérôme qui s'est écrasé à plat ventre en gémissant de voir son impatience enfin récompensée.
Ma main le redresse sur le côté puis vient soutenir mon vit qui l'introduit à mesure que je l'attire à moi, qu'il se replie pour offrir sa croupe à mon épieu, s'empalant sans effort mais en haletant puis entreprenant de coulisser de lui-même sur mon axe d'acier tandis que relevé sur un coude, je fais courir les doigts de mon autre main dans les savanes de son torse pour les brosser, s'emparant férocement, au passage, d'un téton ou de l'autre.
Je le regarde chercher son plaisir, se régaler de ma queue qu'il dévore, sursautant de mes agaceries, soupirant sous les frissons, geignant jusqu'à parvenir à se suffoquer.
Moi, je le guette.
Amical72
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* « L'amour est une énergie douce / Qui réchauffe tant haut que bas / Dans le silence » Julos Beaucarne chante « j’aimerais te parler tendre »
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