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Saison 7 | Chapitre 10 | Mon hôte
– « Ce soir, JE t’invite, Lecourt ! TU boiras MON vin ! »
Dans cette brasserie où j’ai retrouvé Lecourt, je lui ai rapporté mon séjour familial : la maladie de mon père, les questions auxquelles j’ai répondu, annonçant que je suis gay puis évoquant mon avenir : la possibilité de partir après mon diplôme … avant de lui confier que je ne voudrais quitter Les Chênaies pour rien au monde. Il avait tiqué. D’abord parce que mon dévoilement, le plaçant dans la proximité d’une personne ouvertement homosexuelle, l’exposait par contre coup ; ensuite parce qu’il avait sans doute redouté que je ne parte, bouleversant toute son organisation … et peut-être plus, j’ose l’espérer !
Mais je l’avais sans doute rassuré : Les Chênaies sont mon Amérique, à ses côtés. Son regard avait retrouvé de ce velours dont, à pourtant le faire naitre, je ne parviens pas à me rassasier, tant je voudrais que ce regard-là soit en permanence celui qui est posé sur moi.
Ensuite, je me suis appliqué à faire de mon mieux ! JE l’ai emmené dans ce petit restau italien où nous étions déjà allés avec Claude, J’AI passé commande et J’AI choisi le vin, un rouge « frizzante » dont les fines bulles picotent la langue. Nous avons trinqué et nous avons ri quand Lecourt a montré son assiette et dit que c’est en mangeant des pâtes comme celles-ci qu’il a découvert que Monique préparait des nouilles. J’ai réglé l’addition et J’ai galamment tenu la porte pour que MON invité sorte. Nous avons remonté nos cols dans le froid sec de la nuit et nous sommes partis à pied.
– « ça va mieux maintenant, Julien ? »
La bouche et le nez enfoncés dans mon échappe, je réponds d’un grognement sourd et il poursuit :
– « tout à l’heure, je me suis bien demandé ce que tu allais me sortir … »
- « Je n’aurais jamais imaginé que tout cela soit si difficile : mon père, mon coming-out. Puis cette soirée en famille où nous avons joué, été heureux comme avant … même elle est une souffrance. Pardon, patron ! »
Ce disant, je fais un pas de côté en me déhanchant pour le heurter sans sortir mes mains de mes poches, comme un chahut de potaches. Il s’immobilise :
- « Non, Julien ! N’oublie pas que, ce soir, TU m’invites et que c’est TOI, le patron. »
En deux pas, je le rejoins, face à lui à le toucher. Mes yeux cherchent les siens dans la pénombre de la nuit :
- « Lecourt, j’ai mal ! J’ai besoin de retrouver foi en la vie, de prendre les manettes de la mienne à pleines mains. Alors je me suis accroché à toi comme à une bouée de sauvetage, j’ai besoin que tu me regardes pour me sentir vivre … » J’avance mon bassin pour me presser contre lui puis je lui souffle « rentrons »
Nous marchons d’un pas rapide dans les rues pour rejoindre l’hôtel.
Dans la chambre, je tire les rideaux, vérifie les serviettes dans la salle d’eau … Quand je me retourne, Lecourt est appuyé d’une épaule au mur, près de la porte ; il me regarde, bras croisés sur la poitrine et l’air caustique. Surpris et amusé, j’approche et l’interroge d’un coup de menton. Il fait la moue.
– « Je te regarde vivre, comme tu me l’as demandé, Julien ! Après tout, c’est toi le patron ! »
Mais il a du mal à garder son sérieux. Moi aussi d’ailleurs. J’entoure sa taille à deux mains et, balançant mon bassin de gauche à droite, je viens me frotter maladroitement au sien en guise de « je te tiens par la barbichette »
Il a encore de bons réflexes pour un quadra ! Sa main gauche a saisi ma nuque pour attirer vivement ma bouche contre la sienne où il a planté une langue agile et, déséquilibré, je me suis appuyé à deux mains à la cloison derrière lui en l’encadrant, tandis que sa main droite moulait efficacement ma queue. Son murmure atteste de ma vigueur immédiate. Le dialogue de nos deux langues reprend de plus belle et, s’arrachant à son appui, il me repousse à reculons vers le lit où je m’assois à la renverse.
D’une bourrade, il me fait basculer et s’empare de ma ceinture. Boucle, lacets, chaussures qui volent, jean arraché à la faveur d’une pirouette. Il attrape maintenant mon slip à deux mains, plante ses yeux une seconde dans les miens puis tire brutalement sur l’élastique, mon service trois pièces libéré bondit à l’air libre dans un sinistre déchirement de tissu qui le fait glousser et il plonge pour engloutir ma bite dressée et mouillante.
Ah putain, Lecourt ! Comment fais-tu pour me faire autant d’effet ? Je me laisse emporter par cette vague de volupté puis, d’un coup, je le repousse :
- « pas comme ça ! »
D’un bond, je me redresse et, le ceinturant, je le fais tomber à son tour sur le lit, roulant avec lui puis me dégageant. Debout, je m’arrache pull et polo que j’envoie voler par-dessus ma tête et, maintenant intégralement nu, je m’approche de lui, allongé sur le flanc. Je le regarde jubiler, je laisse courir ma main sur lui en balançant mon bras laxe comme un pendule. Une pause. Le chat contemple sa souris capturée et calcule comment il va jouer avec. Mais lequel est le chat ? A genoux, je lui retire chaussure, chaussette et pose son pied sur moi avant de me consacrer au second.
Et lui joue de ce pied nu sur moi. Il le remonte en lacets paresseux puis prend appui sur mon torse, non pour me renverser, juste pour s’opposer, comme à la mêlée. Une fois ses deux pieds dénudés, je l’attire par les jambes pour qu’il se campe devant moi qui déboucle sa ceinture. Il a posé ses deux mains fortes et dures sur ma tête, ses doigts en étoile me pressent le crâne, le massent, tandis que je découvre le slip sarcophage en coton blanc avec sa fente en biais dans laquelle je plonge prestement la main, pour extraire de sa cache le poisson luisant qui le gonfle.
Juste sa bite dure qui dépasse de la poche, en travers et, qu’à mon tour, je suce. Je la ventouse dans une tentative de l’assécher puis je la relâche dans un claquement de langue et me dresse :
- « à poil, Lecourt ! »
Pull, chemise, maillot et enfin, je peux plonger mes mains dans sa fourrure. Fermer les yeux, nouer ma langue à la sienne, presser ma bite contre la sienne que je libère de sa gaine de coton et perdre mes mains, mes doigts dans sa savane souple, bivouaquer dans ses clairières puis m’enfoncer dans les broussailles.
Ses deux mains en pinces redoutables qui enferment mes bras, sa tête qui bascule, son front appuyé au mien : - « Ah Julien … »
Nous sommes deux boucs affrontés, nos cornes croisées, l’échine verrouillée, projetée vers l’avant par nos jarrets tendus. Le premier qui cède basculera dans le vide.
Or c’est lui qui cède !
– « viens dans mes bras, Julien ! »
Mais il a pris ma tête à deux mains, a délicatement enfoui mon visage dans les herbes folles de son torse, m’a entouré de ses deux bras et nous a souplement allongés sur le lit.
Ses grosses mains rudes sont incroyablement justes. Elles savent se faire creuset pour recueillir mon cœur malmené, le soutenir sans l’étouffer tandis qu’il souffle sur ma peine comme sur une brulure, puis le replacer dans ma poitrine quand il a retrouvé son rythme. Et c’est pile ce dont j’avais besoin. Est-ce parce qu’éleveur, il a souvent assisté les naissances et soutenu les premiers pas de nouveaux nés hésitants ?
On roule l’un sur l’autre, on se caresse, on se chatouille, on cherche à faire naitre le frisson. On s’embrasse, on se dévore, on rit. JE ris ! Enfin.
La douleur ne m’a pas quitté, mais elle n’étouffe plus la vie qui a retrouvé sa place en moi. Je me blottis contre Lecourt, je saisis son visage à deux mains et je l’embrasse, longuement, savamment. La vie a repris son cours.
Le désir aussi.
Une leçon magistrale par madame Juliette Gréco : « déshabillez-moi »
Amical72
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