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Premier épisodeÉpisode précédent

Agriculteur | Saison 23 | La saison du rut

4 | Soleil et pluie – Le récit de Julien.

Après avoir raccompagné Gérard jusqu'aux vestiaires, je me dirige vers le hammam dans l'espoir d'y trouver un gourmand qui voudra bien se régaler de ma queue et voilà qu'à un détour, je me heurte à David. Saisissant l'opportunité qui s'offre à lui, il entoure mon cou de ses bras, se presse contre moi, lascivement, en souriant ; sa peau est encore chaude et moite comme s'il sortait de l'étuve. Il minaude, fantasque et enfantin.

- "Puisque ce bon Julien semble avoir terminé de satisfaire son daddy poilu, pourrait-il à présent s'occuper de son neveu adoptif qui s'ennuie de ses câlins ?"

Il bougonne :

- "Il semble que personne ici ne parvienne à me suffoquer aussi bien que tu sais le faire."

Il me noie entre un regard charmeur et des moues mutines de pacotille, frotte son nez contre le mien, en fait trop, mais quand il pique mes lèvres de petits bisous, ondule, se frotte et se colle à moi, que voulez-vous ? ... je ne suis pas de bois!

Conscient de mon réchauffement, il sourit, canaille puis me souffle : "viens !". Il arrache nos pagnes qu'il accroche à une patère, me saisit par le poignet et m'entraîne à sa suite dans le hammam. Jusqu'au fond, dans la partie la plus sombre.

La banquette de céramique semble libre, nous nous y asseyons côte à côte. J'ai un hoquet de surprise, immédiatement suivi d'un soupir d'aise quand, basculant sur moi, il me prend dans sa bouche fraîche et habile à me faire retrouver toute ma verdeur. Il se tapote le visage avec mon mandrin raidi dans un murmure sonore de délectation avant de reprendre l'exercice sans chercher à rester discret. Son entrain cambre mon rein et renvoie mes épaules en arrière, en appui contre la paroi. Je suis tout entier à sa caresse gourmande.

Mais un glissement furtif sur ma gauche m'alerte, il est suivi d'un timide toucher réfrigérant sur ma peau que la touffeur ambiante à instantanément rendue brûlante et moite. Ce n'est qu'une ambassade précédant l'exploration d'une main qui s'épanouit à la suite sur mon flanc, se réchauffe en glissant à ce contact et remonte pour cerner mon téton où une bouche se fait ventouse assoiffée.

Je mène promptement une enquête tactile : cheveux et barbe courte, épaule et dos secs et dessinés, je fléchis la nuque pour joindre mes lèvres à celles que je devine se tendre vers moi et aussitôt nos langues frétillent et se croisent sans plus chercher à s'apprivoiser, mon interlocuteur s'inclinant en même temps sur celui qui, me dispensant largement ses gâteries, entretient ma fièvre. Mais une autre main s'est posée sur ma cuisse, à droite cette fois, et ma bite a changé de poigne avant de se faire à nouveau engloutir. C'est tout aussi redoutablement efficace, tout aussi suffocant. Serais-je au paradis de la pipe ?

Mais j'ai sursauté, respiration bloquée et mon interlocuteur de gauche s'est empressé de plonger sur un David libéré de son oscillation métronomique. Je comprends à certains ronflements qu'une discussion similaire s'engage allègrement entre eux.

Je découvre à tâtons l'anatomie de mon suceur supplétif, l'une de mes mains se perd dans ses cheveux courts, accompagnant la pulsation et les différentes rotations et inclinaisons de la tête qui me dispense de si agréables libéralités ; ses formes rassasiant la seconde qui ne demande qu'à l'être, s'arrondissant sur son épaule, s'insinuant sous son torse pour s'emparer d'un pectoral charnu et souple, souligné d'un nuage de fin duvet, orné d'un large téton soyeux et prometteur pour revenir arpenter en tous sens un large dos, faisant naître, derrière mes paupières closes, des images gourmandes de chairs lisses et pleines dont, assurément, je vais me repaître jusqu'à satiété.

Soudain, une main en pince saisit mon bras, stoppant net ses plaisantes pérégrinations ; un souffle, puis une voix murmure à mon oreille.

- "Prends-le, il n'attend que ça !"

La main a dévalé mon bras jusqu'à la mienne pour s'emparer de mon index et de mon majeur qu'elle réunit. Elle étire mon bras et attire le bout de mes doigts jusqu'à l'amorce d'un sillon. Ma respiration se raccourcit. Des traces visqueuses agglutinent le duvet dans la fracture, il me semble que la prudence voudrait que je résiste mais la pente m'invite, comme des rives s'effritent pour faire déraper l'imprudente fourmi vers le centre du cratère creusé par le cruel fourmilion carnassier qui s'y tapit. La pointe de mes doigts se noie dans le gel gluant puis piétine alternativement un anneau qui paraît vouloir se prêter docilement au jeu. Alors l'un d'eux, plus affuté, le transperce.

Mes flèches se font de plus en plus précises. Elles suspendent, l'instant d'un hoquet, les sidérantes aspirations qui n'en reprennent que de plus belle, plus profondes, plus suffocantes en retour. La voix, toujours elle, marmonne ses injonctions salaces à mon oreille.

- "Vas-y, ouvre-le ! Prépare-le pour ta queue ! Tu sens comme son cul de glouton serre tes doigts? Mets lui les deux ! Profond."

Mon oreille s'en nourrit mais ce qu'ignore ce souffleur aveugle, c'est que, déjà, mon pouce s'intercale entre eux et tourne en tous sens, comme on nettoie le col d'un verre, s'assurant qu'il est parfaitement lisse, sans égrenure risquant d'écorcher les lèvres qui vont s'y étancher. Le verre a couiné et je réclame à mi-voix mais sans discussion possible :

- "Capote."

S'ensuit une confusion alentour, dans une contagion générale, un fondu au noir entre deux tableaux, mis à profit pour dérouler de fines membranes de latex qui claquent, presser le flacon de lubrifiant qui grince comme d'un essoufflement de phtisique, pour rapprocher mes ischions du bord de la banquette ou, pour lui, se retourner, croupe tendue.

Mon voisin de gauche lache un "putain !" sonore, comme celui qui accompagne un premier essai couronné d'un succès inespéré et je deviens sourd à tout ce qui ne sert pas ma propre estocade, celle à laquelle j'aspire sans barguiner, orientant mon épieu durci au feu, réglant son inclinaison, guidant l'approche du fessier dont l'anneau coiffe mon étrave puis la couronne, attentif à moduler le lent recul du plantureux fondement qui s'applique à s'y embrocher, freinant sa descente sitôt qu'elle est, assurément, bien engagée.

Pour n'en rien perdre, ni aucun des frissons que procure chaque millimètre somptueusement englouti qui me stimule comme une conquête, aucun des ahanements précipités de celui qui m'avale, non plus que ceux de David, en écho, qui, je l'imagine aisément, s'empale pareillement sur ma gauche, aucun des encouragements orduriers que profère la voix, soutenus par les flaflas frénétiques de son poignet.

A mes oreilles bourdonnent des râles et des geignements de bacchanale. Des bras s'insinuent, des doigts nous effleurent, reviennent en inquisiteurs, cherchent à vérifier la raideur des mats, la réalité visqueuse de nos imbrications intimes ; des mains nous happent, nous pétrissent dans cette presque obscurité propice à toutes les rapines furtives, qui garantit l'impunité à tous les braconnages même les plus hardis.

D'un coup de rein, je me suis soulevé de l'assise pour achever de planter mon dard dans ce gros popotin si accueillant. A deux mains, j'ai cassé son rein, projetant ses épaules vers l'avant où il a dû trouver un appui, reprendre son équilibre. D'une balayette du pied, j'ai réglé l'écartement entre les siens pour le placer à l'exacte hauteur qui me permet d'aller et venir souplement de toute mon envergure dans son délicieux conduit velouté, de faire claquer mon ventre contre ses fesses replètes et, parachevant d'un ultime raidissement du rein, lui arracher un gémissement de capitulation en prime. Une transe viscérale et étourdissante, celle d'un rut mécanique et forcené.

A mon côté, la voix éloigne les intrus les plus envahissants et scande d'un discret murmure notre rythme binaire. C'est l'air de la carmagnole, l'entrain du coït magistral, rayonnant ; il illumine nos coeurs présomptueux qui s'emballent.

Puis ... est-ce parce que j'ai déjà beaucoup payé de ma personne? Est-ce parce que, debout dans l'étuve, j'ai la tête non loin du plafond là où l'air est le plus chaud, presque asphyxiant alors que mes pieds pataugent dans une eau qui me semble soudain froide ? Est-ce la pénombre qui, tout à l'heure abritait le plus excitant des mystères et, d'un coup, se déchire en ébauchant des silhouettes spectrales dont les râles et les soupirs résonnent en cacophonie lugubre?

Brusquement, j'étouffe, je suffoque et ce n'est pas d'extase, non. Je me tourne à demi vers la voix que, d'une main ferme, je propulse à ma place.

- "Tiens, profite, c'est ton tour."

Puis je me dégage fermement de cet enchevêtrement, bousculant l'un ou l'autre pour achever de m'en extraire, pour, enfin, échapper à cet étouffoir, claquant la porte dans mon dos pour emplir mes poumons d'un air extérieur qui me parait plus frais.

J'arrache la dérisoire pendeloque de latex qui étrangle encore mon gland à l'extrémité de ma bite flaccide pour me ruer sous la douche, offrant d'abord aux jets mon visage rubicond, puis mes épaules que j'étire pour les détendre comme après une longue séquence de piscine.

La porte s'ouvre à nouveau sur deux silhouettes, celle d'un David rayonnant suivi pas à pas par un grand escogriffe osseux qui l'enlace et le bisouille avec empressement. Il se redresse en me révélant le sourire extatique de qui n'en revient pas de sa chance, celle d'avoir décroché une telle timbale. Prenant place à mon côté, David ondule sous le jet d'eau chaude, se prête complaisamment aux enveloppements des grands bras volubiles, courbe sa nuque sous les lécheries et les baisers. Prend-il mon sourire amusé pour une question?

- "Hmmm ! Je crois que je vais rester encore un peu."

Le visage du gagnant de la soirée a jailli, lunaire, éberlué d'être à nouveau l'élu, avant de replonger pour cajoler l'objet de sa convoitise qui glousse et proteste mais finit par céder dans un ronronnement de chat. Un rapide coup d'oeil me permet d'entrevoir une solide détermination qui devrait ravir le gourmand David. D'une main ferme, j'étreins son épaule un peu anguleuse à mon goût – mais ne dit-on pas d'un bon coq qu'il n'est jamais gras ?- je l'engage, le pointant de l'index :

- "Toi, prends bien soin de mon neveu, surtout."

Sur la route des Chênaies, je repense à Gérard, l'ours gris qui s'est dérobé par crainte d'être emporté. Une vague d'indignation monte brusquement : pour QUI me prend-il? Lui aurais-je présenté un profil de pillard qui dévaste, ravage et finit par brûler tout ce qu'il ne peut emporter ? Mais un regret me pince presque immédiatement, celui de ne pas avoir su me montrer probablement assez rassurant pour établir une confiance, ébaucher une estime, d'avoir, par légèreté, gâché l'occasion d'une rencontre et, qui sait ? peut-être d'une amitié.

Puis je revois le visage épanoui de David, mon "neveu" d'adoption et je souris ; celui-là, quel numéro, quel polisson jouisseur! En voilà un qui sait user de malice pour s'attirer toutes les bonnes graces. Quelle surprise me réserve-t-il encore?

C'est l'alternance naturelle du soleil et de la pluie, ainsi va la vie.

(A suivre.)

Amical72

amical072@gmail.com

"Donne du rhum à ton homme/ du miel et du tabac / donne du rhum à ton homme et tu verras comme il t'aimera." Voici, réalisé en 1970, un enregistrement en public étonnant de fraîcheur, probablement peu répété, un hymne aux plaisirs

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