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3 | L'autoriser
Le récit de Julien
Je rentre aux Chênaies au petit trot cadencé qui me berce, m'absorbe comme une litanie. Je panse rapidement ma monture qui retrouve ses congénères au pré puis je vais me rincer rapidement sous la douche. Un dernier tour pour vérifier que tout est tranquille et je rentre pour casser une croûte et m'allonger à poil sur le canapé en feuilletant distraitement une revue, une cantate de bach en sourdine. Je végète dans un état de vacuité disponible après cette belle journée.
Soudain, on toque à la porte.
Je n'ai fait qu'un bond pour l'ouvrir à la volée, prenant le risque de ranimer un espoir que je gardais jusqu'alors soigneusement à bas bruit.
Gagné! Mehdi est sur le seuil, tenant son casque d'une main, la tête demi inclinée sur son épaule, un sourire incertain aux lèvres.
- "Je peux entrer?"
Sans répondre, je m'efface et l'invite du geste à avancer. Puis je referme la porte derrière lui en le retenant au passage, de ma main libre. Le toucher ...
- "As-tu dîné?"
Il pouffe dans un haussement d'épaule.
- "Ma mère ne m'aurait jamais laissé partir le ventre vide ... Je lui ai dit que je commençais tôt demain matin."
- "Et ... ?"
Je le fixe du regard, impatient de l'entendre me dire qu'il était venu me retrouver, mais je l'ai coupé si sèchement qu'il en reste interloqué. Je corrige aussitôt sur un ton plus amène.
- "Je voulais dire : A quelle heure prends-tu ton travail, en fait ?"
- "Je prends un nouveau poste et j'ai rendez-vous à neuf heures, alors ..."
Il garde à nouveau la tête baissée. Il ne dira rien de plus, c'est certain. Ma main le ramène souplement à moi pour lui glisser à l'oreille.
- "Moi, ce week-end, en t'attendant, je me suis dit que je prendrais volontiers une habitude ... celle que tu dormes plus souvent avec moi ... que j'aimerais essayer ... si tu en as envie ..."
Entre chaque phrase, je marque une pause qui me donne le loisir de respirer longuement son odeur, mêlée à celle du cuir et du vent, dans un air qui me parait vibrer de mille tensions, entre mon impatience retenue à grand peine et son infime raidissement sous la confidence. Alors je romps en claironnant.
- "Débarrasse-toi ! Je te sers un verre d'eau pour te désaltérer après cette route ?"
Il m'a tourné le dos en grognant son assentiment et, dans le bruit d'arrachement des scratchs, je vais remplir deux verres puis je m'asseois d'une fesse sur l'angle de la table pour le mater tout à mon aise, mon joli beur breton. Il s'en assure d'ailleurs du coin de l'oeil et sourit.
Il range ses affaires, soigneusement comme d'habitude, sur la chaise près de la porte puis il approche. Il a gardé son tee-shirt et son shorty gris en fine maille de coton, d'où s'échappent ses bras et ses longues jambes poilues. Ma bite se réchauffe nettement contre ma cuisse en envisageant effrontément ce beau mec brun qui en est comme toujours, un peu embarrassé. Je lève mon verre, il trinque et boit face à moi. Moi, je le détaille, je prends plaisir à le deviner, sous le vêtement ample.
Quand il abaisse son coude, je me détourne pour poser précautionneusement mon verre auquel je n'ai pas touché, puis j'étend vivement le bras pour saisir le flot du tissu à poignée et brusquement ramener son occupant à moi. Je profite de son léger déséquilibre, le débarrasse de son verre, l'enlace, le serre contre moi en pétrissant son petit cul musclé.
Mais il s'est écroulé sur moi avec trop de facilité pour être tout à fait innocent, lui aussi. Sa main droite vient justement s'appliquer sur ma queue désormais tout à fait en ordre de bataille et, d'un geste vif, la mienne la recouvre pour la maintenir en place.
- "A plusieurs reprises, ce week-end, tu m'as manqué et j'ai imaginé que tu voudrais encore jouer avec elle, Mehdi ! Montre-moi maintenant ... si tu veux bien."
Il m'adresse un rapide coup d'oeil noir et indéchiffrable, prend fermement ma bite en main, la ramène à l'horizontale, s'humecte rapidement les lèvres de salive, pose un genou au sol et l'engloutit, les yeux mi-clos, déjà tout entier consacré à notre plaisir .
J'ai rugi en contractant mes fessiers pour lui offrir toute mon envergure et, d'une main sur son occiput, je l'ai accompagné alors qu'il s'efforçait de l'avaler. Car, outre de l'appétit, il a un sacré savoir-faire, l'animal ! Comme inspirées, ses lèvres s'ajustent, me pressent, sa langue s'enrubanne, sa bouche m'aspire et m'enveloppe et je pourrais facilement me laisser emporter.
Trop facilement!
"J'ai tant rêvé de toi que tu perds ta réalité ..."
Or je ne veux pas me laisser étourdir par des fantasmes, ces illusions que j'ai dû longuement cultiver pour pallier son absence ; c'est avec la réalité retrouvée d'un Mehdi de chair et de désir que je veux dialoguer, jusqu'à nous éblouir mutuellement. Je le retiens dans son mouvement de balancier et il lève les yeux vers moi, ouvrant grand la bouche d'où ma bite s'échappe, encore reliée par un fil de salive translucide qu'il efface d'un vif coup de langue.
- "Oui, ce week-end, j'ai PENSÉ à toi, j'en bandais et je suis TRÈS content que tu sois là ce soir. D'ailleurs, moi aussi, je veux te montrer."
Je l'attrape à deux mains sous les aisselles, saute sur mes deux pieds et le relève, lentement. Il semble déconcerté, mais pas inquiet, non! Pourtant il ne sait à quoi s'attendre et celà m'amuse de pimenter ce moment d'incertitude. J'avance sur lui qui recule, ses yeux sondent les miens qui doivent pétiller d'une malice impudique. En quelques pas, nous avons traversé la pièce et le voilà acculé au mur. Mes mains soulèvent son tee-shirt, glissent en dessous sur sa peau douce redécouverte, l'enveloppent, ébouriffent ses courts poils drus, mes bras l'entourent, poupée de chiffon qui se laisse volontiers manipuler en souriant.
J'ai étendu le cou, tête légèrement inclinée et ses lèvres ont rejoint les miennes, nos langues se sont nouées comme un flot de ruban de satin qui coulisse, un pas de deux souple et accordé.
Des deux mains, j'ai retroussé son maillot sur le haut de son torse, il a levé les bras, obéissant spontanément à cette invitation, et je saisis le moment où il extrait sa tête du col pour inverser nos inclinaisons et reprendre le baiser là où nous l'avions interrompu. Mais alors, mes mains, mes doigts courent librement sur lui, des hordes d'insectes qui piquent, griffent, dévalent, zèbrent sa peau qui se hérisse, il frissonne et sa langue presse la mienne plus étroitement comme pour se protéger, se rassurer ... ou tirer parti de ce prétexte pour pousser son avantage, le fripon.
Mes deux mains à plat sur ses reins l'attirent à moi et nos deux bites affrontées se jaugent entre nos ventres qui frétillent pour les disposer, exactement parallèles. Puis le bout de mes doigts glisse sous l'élastique du boxer et, d'une vive rotation, je le libère du vêtement. Ma main droite s'est emparée de sa hampe qui suinte pour la dégager et je m'accroupis pour que la gauche extirpe ses deux pieds du tissu. La jolie tige est juste à hauteur de mes yeux. Un bonheur à contempler ...
Alors je prends mon temps ...
Une hampe bien droite à la peau mate et satinée émerge de sa brune prairie qu'il garde rase et, dans un dégradé coloré, elle se termine par un bouton effilé d'un rose franc. Il est peu ourlé et donne à sa queue une forme fuselée, lisse et ... dynamique. D'un doigt, je l'abaisse à l'horizontale et ma langue la parcourt, lentement, dessus et par en-dessous la chatouillant parfois de l'apex, revient en la mouillant largement de salive. Puis d'un coup, je l'aspire, la bouche en ventouse pour l'assécher et recueillir tous ses fluides.
Il a sursauté, s'est légèrement crispé en poussant un faible geignement, est-ce sous une vague de volupté trop forte ? Je crois que je l'ai encore trop peu sucé, ce grand demi-breton circoncis, et je me délecte à la perspective d'y remédier au plus vite.
J'aperçois, du coin de l'oeil, qu'il jette de temps à autre des regards inquiets vers la porte, en alternance avec de profonds soupirs face à un plaisir qu'il retient et qui, pourtant, le submerge, chaque fois comme par surprise. Pourtant, il ne semble pas en mesure de se détacher totalement de son appréhension pour s'abandonner à mes caresses en toute quiètude. Je me redresse, l'enlace étroitement.
- "Personne ne nous épie, Mehdi ..."
Mais son regard reste lointain, retenu par je ne sais quelle crainte encore. Alors je me détache, je vais fermer la porte à clé et tirer les rideaux. Puis je reviens vers lui. Il a froncé les sourcils dans une mimique qui se veut implorante.
- "Excuse-moi Julien, mais je redoute qu'un visiteur ne déboule encore à l'improviste ..."
Je lui ai souri non sans noter cette fine ride oblique qui, depuis la racine du nez, barre de biais au-dessus de son sourcil celles qui, horizontales et parallèles, strient son front. Cet infime détail que, je l'imagine, peu de gens ont remarqué, m'attendrit en me le rendant plus ... plus précisément familier.
Je ne peux réprimer un sourire dû à la satisfaction de l'avoir encore un peu découvert, ce grand gandin tout embarrassé, qui danse d'un pied sur l'autre en me regardant, l'air à demi penaud. Je tends la main vers lui et, d'un signe de tête, l'entraîne à ma suite jusqu'à la chambre. Sitôt le seuil protecteur franchi, je le retrouve en amant délicieusement prêt à fondre dans mes bras, sa langue venant spontanément s'enrouler à la mienne pour un dialogue enjoué.
Et je craque !
Rien ne m'émerveille plus que sa rédemption par la volupté, quand il s'accepte, enfin, et autorise son corps à jouir comme il aime.
Présomptueux comme tous les hommes -sans doute nous croyons-nous missionnés pour changer la face du monde - je ne doute pas un instant qu'avec un peu de constance et quelques milliers de caresses, je parviendrai à ce qu'il s'assume tel qu'il est : pédé et enfin heureux de l'être !
Je crois avoir, d'ailleurs, quelques tours dans mon sac pour l'y aider.
Amical72
amical072@gmail.com
* "J'ai tant rêvé de toi que tu perds ta réalité "est extrait du recueil de Robert Desnos "à la mystérieuse"
* « Il voudrait acheter la lune pour vous l’offrir dans un papier, vous êtes sa plus ceci, sa plus cela » En 1937, Mireille, grande dame à la voix acidulée, chante . « sa plus ceci, sa plus cela »
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