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Chapitre 5 | Savoir être Nageur Sauveteur
- « Putain, tu me largues avec mes sacs sur un trottoir comme un machin à usage unique qu’on jette après en avoir bien profité. Tu pourrais au moins me déposer chez moi, sans m’imposer de prendre le tram alors que tu ignores s’il circule encore à cette heure. »
Devant la violence du propos de Toni, sa figure butée, les yeux au sol qui ne m’accordent pas un regard, je redémarre posément la voiture et prends la direction de la Cité Universitaire.
- « Je crois, Toni, que tu n’as pas bien écouté l’alternative que je t’ai proposée. Tu PEUX rentrer chez toi mais tu peux AUSSI choisir de revenir dormir à la maison avec moi, comme je t’y ai invité. »
Je conduis souplement et pas très vite. Soudain, je sens une main de poser délicatement sur mon bras, puis les doigts bouger imperceptiblement et esquisser une caresse. Devant la Cité U, Toni me dit :
- « aide-moi à monter mes sacs, s’il te plait, je voudrais me changer »
Arrivés dans sa chambre, il vaque calmement, sans me regarder, range ses affaires, rassemble quelques vêtements et, tête baissée, désigne son lit d’une place :
- « tu as raison, nous serons plus confortables chez toi » Il relève franchement ses yeux quelques secondes dans les miens et nous redescendons tranquillement, comme si tout avait toujours été envisagé ainsi. Je lui lance les clés du coupé, il les attrape au vol avec un de ses sourires lumineux et se met au volant. Je regarde fixement la route.
- « Sais-tu, Toni, que le pire n’est jamais certain ! » Il sourit :
- « je redoutais le moment où nous allions arriver, l’incertitude m’angoissait. Je t’ai juste entendu dire « je te rends ta liberté » ensuite, plus rien, j’étais sourd »
- « Il faut croire que la réponse avait un peu d’importance pour toi, alors … » Je laisse passer un silence. « Tout comme pour moi, Toni. Et je suis content que tu aies fini par m’écouter. »
Il tourne la tête vers moi.
- « heureusement que vous avez répété, M’sieur … »
- « regarde ta route, Toni ! »
- « Oui, M’sieur »
- « Adrien, je m’appelle Adrien. »
- « oui, M’sieur » et il rit.
Merde ! Mais qu’est-ce que j’étais en train de faire. Je sais pertinemment que ramener une nouvelle fois ce garçon à la maison me vaudra, au pire, une foule d’emmerdements ou au mieux une avalanche de complications dans ma vie déjà bien remplie et en plein boom professionnel. C’est inéluctable ! Alors pourquoi, rien qu’à le regarder de profil, concentré avec ce léger sourire aux lèvres, je cours me précipiter dans cette aventure ? Je lui demande :
- « Toni, quel est ton objectif principal à ce moment de ta vie ? »
Il fronce ses sourcils un instant :
- « je suppose que c’est de terminer mes études pour obtenir mon diplôme et trouver un bon job, pourquoi ? » Puis ce petit sourire revient sur ses lèvres « et je crois que l’aide de mon tuteur en entreprise me sera précieuse … et galvanisante »
Je me carre dans mon siège, bras croisés et la mine renfrognée, je grommèle :
- « je suis très exigeant »
Il éclate joyeusement
- « je suis certain que je peux parvenir à répondre au niveau exigé, d’ailleurs tu m’as dit toi-même que j’ai fait des progrès … fulgurants, non ? »
Je me rends compte que, dans les faits, je lui ai déjà donné mon accord et j’en suis comme soulagé. Pour la première fois, je n’ai pas envie de … quand je pense à ma tranquillité, au calme retrouvé de ma solitude … Je ne parviens pas à écarter sa présence, sa chaleur … J’ai envie de prolonger ce sentiment de plénitude de l’avoir à mon côté …
Toni se concentre sur sa conduite, entre dans le parking, gare le coupé, appelle l’ascenseur, quitte ses chaussures sur le palier pendant que je déverrouille la porte, entre sur mes talons et, sitôt la porte refermée, me colle au mur de tout son corps et me roule une pelle.
Amical72
amical072@gmail.com
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